20 nov. 2013

830 - Pour en finir avec l’expression « Records Management » (3/4)

Il y a 40 ans, Robert Garon, celui qui m’a enseigné les rudiments du métier que je pratique encore aujourd’hui, définissait dans ses cours les « Records » (par opposition aux « Archives » comme étant les « séries de documents et de dossiers issus des ministères et des organismes gouvernements du gouvernement Canadien (administration fédérale) créés dans le cadre de leurs activités (mission et gestion) » [extrait de mes notes de cours, été 1973]. Une vision anglophone qui se démarquait de celle proposée dans le Manuel d’archivistique français axé sur les archives, documents de conservation permanente. Pour appuyer son enseignement, il nous référait au premier manuel américain qu’un certain William Benedon, directeur des services administratifs à la Lockheed Martin Corporation,avait publié à New York, en 1969, chez Prentice-Hall et intitulé Records Management. À l’époque et pendant bon nombre d’années, la « bible » en la matière.

Il y a quelques jours, avec l’assistance de l’archiviste de l’Université Laval, Carole Saulnier (que je remercie), j’ai récupéré une copie de la page 258 du volume de Bill Benedon dont j’espérais qu’un exemplaire était toujours précieusement conservé dans cette institution où j’ai fait mes premières armes. 

Dans le lexique, on y trouve la définition de « Records ». Comme vous pourrez le constater, il n’est ni question d’enregistrements, de disques, de documents dit engageants…

« RECORDS (GRM) : Any paper, book, photograph, microfilm, map, drawing, chart, card, magnetic tape, or any copy or print-out thereof, that has been generated or received by a company or its operating units, and has been used by that company or its operating units or its successor as evidence of its activities or because of information contained therein ».

Deux mots sont importants dans cette définition proposée par l’auteur : « Any » et « Activities ». Le premier confirmant l’entièreté des documents et des dossiers d’une organisation qui doivent être pris en charge par le « Records Management ». Et le second... qui vient appuyer le choix d’ISO.

Un texte d’un autre siècle, me direz-vous. Je vous propose alors la vision d’Elizabeth Shepherd et Geoffrey Yeo, deux spécialistes britanniques en « Archives and Records Management ». Dans leur ouvrage Managing Records, publié en 2003 chez Facet publishing dans la foulée de l’adoption de la norme ISO 15489, les auteurs définissent ainsi « Record » et une « Activity » :

Record : « The essential characteristic of a record is that it provides evidence of some specific activity. […] Records provide evidence that can be used in any situation where proof of a particullar activity is required. » (p. 2)

Activité : « an action or set of actions undertaken by an individual, a group of individuals or a corporate body, or by employees or agents acting on its behalf, and resulting in a definable outcome ». (p. 2)

À la page suivante, ces deux spécialistes font le lien entre une activité et la création d’un « Record » : « Records are a product of organisational activité, created or received during of after completion of the activity itself. » (p.3)

Comme on peut le constater, ces définitions (Benedon + Shepherd et Yeo) sont englobantes. Elles rendent tout à fait inappropriées les notions d’ « enregistrements », de « documents engageants » et même d’ « archives » qui contribuent à la confusion dans la relation métier/client. Elles confortent le choix du sous-comité ISO/TC 46/SC 11 et donne toute la légitimité d’associer sous l’expression « Information et documentation – Gestion des documents d’activité » les normes actuelles et futures qui nous guident dans nos interventions professionnelles et qui nous assurent une plus grande crédibilité dans l’action. Aussi, une fois révisée, la norme 15489 pourra elle aussi porter un titre plus évocateur qui, je le rappelle a fait consensus auprès de 26 pays dont le Canada et la France. (À suivre)

Michel Roberge

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Bonjour Michel,

Je viens de lire avec grand intéret ton 3ème billet sur l'expression RM. Très vivifiant et très très instructif !
encore merci
Arnaud Jules